Léonie a passé une belle journée aujourd’hui. Elle retrouve son autonomie perdue depuis ce 24 février, 10 jours avant notre départ à Monterrey. Elle n’oublie pas de pédaler sur son vélo et de travailler. Et même son visage tuméfié par une mauvaise chute ne contrarie pas sa volonté de faire.
Cette maladie à ce vilain défaut d’emporter le rire de votre enfant pour le troquer contre une grimace de douleur. Elle ne prévient jamais quand elle frappe ni où ni comment. Ces oscillations sont dures pour notre fille et son entourage. Alors on n’oublie pas de rire et quand la maladie bloque les sons dans sa gorge et finissent entremêlés aux bords des lèvres, Léonie s’impatiente d’impuissance. On regrette ce temps où nos repas raisonnaient de ces histoires interminables d’école et de copines nous privant parfois sa mère et moi de communication. Nous continuons de croire que ce que nous faisons lui sert pour encore profiter de la vie et de l’insouciance de son âge.
Mais aujourd’hui je me rends compte que Léonie a pris le contrôle de sa vie. Elle ne veut plus nous impliquer dans sa maladie car elle sait que ces moments nous pèsent en tant que parents. Et même si je passe mes journées à la pousser à jouer avec les nuages et à faire briller ses jolis yeux au soleil, elle ne veut plus nous faire ressentir ses douleurs, ses pleurs ou ses peines. Lasse de ces 10 mois, elle ne veut que notre bonheur et certainement pas prendre la responsabilité de cette chronique. Nous la porterons aussi longtemps que possible pour lui dire que personne n’est responsable de cette tragédie. On se mobilise à chaque instant pour elle et resterons dans son pays…à jamais.
Quand la nuit frappe à ma porte et que le sommeil ne s’invite plus alors je me mets à penser et à écrire … Il me parait si lointain ce temps de l’insouciance où chacune de mes minutes me servait à apprécier ou à me reposer.
Face à ce jeu de damier où chaque coup semble vous mettre en échec, tout parait dérisoire. Chaque moment se transforme en problématique sans réponse et me pousse dans ce labyrinthe. Il me fait tournoyer pour m’amener aux vertiges d’une vie malmenée ou peut être mal menée.
Je sais tant de choses sur ces petites cellules que ma fille ignore. Le poids de mes recherches me pèse et me contraint au silence. Alors chaque jour, chaque nuit papa Dipg, je vis avec la même idée ….”Cela n’aura plus jamais de fin car c’est le destin de ma vie”. Et je devrais le porter pour l’emporter comme une marque au fer.
Cette idée s’estompe dès que mes princesses se lèvent et attendent de moi que je reste leur papa, ce héros. Je suis chanceux.
Il n’y a pas cependant de sens à ces événements contre nature. Inutile d’en chercher. Penser que la loi des nombres vous rend moins seul à vivre ces drames millénaires ne vous réconforte guère plus….Notre unique porte de sortie pour ne pas finir échec et mat dans l’immédiat est de se convaincre que tout cela n’arrivera pas. Les mots comme espoir ou combat se parent alors d’une majuscule. Ils nous transforment en chevalier partant en croisade contre l’invisible.
Mais peut on dompter ces sentiments qui comme de l’acide brûlent votre cœur et acidifient votre goût aux belles choses? Non! Il faut conjuguer avec ces idées noires et ce sentiment que la vie est aussi une richesse personnelle qui doit forcément être partagée de tous et pour tous. L’amour ne doit pas s’éteindre ou se rétrécir . Donner de l’amour c’est se donner l’espoir que la vie raisonne en couleurs. Au fond la vie et la mort resteront éternellement indissociable.
Dans quelques heures le soleil sonnera une nouvelle journée et je recommencerai à me battre avec Cathy par amour pour nos filles car n’oublions pas que c’est de cet amour que tout a commencé.
Et je suis si heureux de vous avoir à nos côtés pour entendre vos rires, voir vos sourires et sentir votre soutien.
Merci.
Tous avec Léonie .I hate Dipg!