Une nouvelle fois, le gouvernement et ses disciples ont rejeté un amendement permettant de davantage financer la recherche concernant les cancers pédiatriques. Sous l’impulsion de l’ex- ministre, Eric Woerth, un financement par fléchage de 18M d’€ était réclamé pour exprimer un geste fort à l’attention des chercheurs et des associations de parents. 

Pour mieux comprendre la situation et toujours dans un effort de sensibilisation, il est intéressant de définir les protagonistes de cette histoire apparentée de plus en plus à une tragédie. (Vous retrouverez à droite les noms des personnes et institutions impliquées). Les associations et le gouvernement ont compris que les laboratoires freinent volontairement le développement de nouvelles molécules ciblées et destinées aux cancers pédiatriques. La raison est simple: Pas assez de cas pour amortir des coûts de recherche donc peu de rentabilité à le faire. La ministre de la santé l’a encore rappelé récemment à l’assemblée devant les parlementaires.

A écouter Mme De MontChalin sur cette vidéo postée, le ministère de la santé ne dort plus la nuit et souffre le jour comme les parents face à la maladie de leur enfant afin de trouver les meilleurs mécanismes de financement pour notamment l’immunologie et la recherche fondamentale. 

Alors voyons  ensemble ce qui se passe sur le terrain. Il y a les grandes fondations comme Gustave Roussy à Villejuif qui se donne pour objectif une collecte de 10M en 3 ans pour espérer entamer des recherches notamment en immunothérapie dès 2020. Il y a la S.F.C.E regroupant des chercheurs et qui grâce essentiellement aux dons d’enfance Cancer Santé arrive à financer des programmes de recherches. Il y a la Ligue du Cancer qui encore une fois avec les dons des français apportent un soutien à la recherche et ses familles. Et puis il y a des dizaines d’autres associations ou fondations qui œuvrent chaque jour sur le terrain pour tendre la main à un public plus que concerné. Alors vous voyez messieurs et mesdames du gouvernement, il n’y a pas trop d’argent de l’Etat dans les institutions de recherche mais beaucoup d’argent obtenu par la générosité des donateurs.

Les associations ou fondations jouent un rôle important dans l’aide apportée aux familles et du financement de la recherche. L’Inca le reconnait sur son site ou l’on peut lire :

L’IMPLICATION PERMANENTE DES ASSOCIATIONS

De nombreuses associations de parents se sont fortement investies dans l’amélioration de la qualité des soins et dans le soutien à la recherche, par des actions diverses :

  • Permanence et organisation de temps de rencontre (« café-croissants ») entre parents ;
  • Participation à l’achat d’équipements permettant l’amélioration des conditions d’hospitalisation ;
  • Gestion des maisons de parents ou mise à disposition d’hébergements proches de l’hôpital ;
  • Financement d’activités ludiques, de séjours de ressourcement ;
  • Financement de groupes de parole pour les soignants ;
  • Soutien logistique et financier aux familles, pour les frais non remboursés ;
  • Élaboration de documents d’information sur la prise en charge adaptés aux parents, à la fratrie et à l’enfant lui-même ;
  • Financement de postes pour la recherche fondamentale ou clinique ;
  • Implication dans la mise en place du maillage de soins de proximité.

C’est très bien, mais il semble que les gouvernements successifs ont décidé que cela pourrait être un mode parfait de fonctionnement et ce qui devrait être le bonus d’une recherche se transforme peu à peu en modèle. 

Si la forme de ce modèle de financement ne présente pas d’inconvénient, dans le fond cela représente un frein majeur dans l’innovation et le financement des projets de recherches. Des associations et des chercheurs s’accordent à penser que sans ces fonds dédiés, il est fort probable que la recherche avance moins vite. Vous l’avez compris, il ne s’agit pas de mettre 20M sur la table et de s’imaginer que l’année N+1 tous nos enfants seraient soignés. Non, la recherche et sa médecine sont un domaine qui demande des perspectives et de la patience… Mais chaque année à palabrer sont des années et des enfants perdus…

Le président ne s’en cache pas, sa campagne et son succès il le doit aux donateurs et aux industries qui l’ont fortement soutenus financièrement. S’il se trouve sur cette liste c’est aussi parce que l’industrie pharmaceutique à été généreuse lors de sa campagne. Est il aujourd’hui dans l’obligation de rendre des comptes à ses donateurs? 

Mme Buzyn en tant que ministre de la santé joue un rôle clé dans ce refus. Contre le financement par fléchage d’une manière générale, Mme Buzyn se dit attentive à la situation des cancers pédiatriques. Elle s’appuie sur les chiffres de l’Inca (Institut national du cancer) mais en aucun cas elle ne propose une table ronde pour aborder le sujet de l’AJPP, de l’aide aux familles, des parcours en soins palliatifs…  

M Castener a été plusieurs mois entre 2017 et 2018 chargé des relations avec les parlementaires. Depuis peu, il a été nommé ministre de l’intérieur. Il y a deux ans lors de la campagne présidentielle de M Macron, il avait reçu les associations dans sa permanence pour leur faire part de son soutien. Depuis son arrivée au pouvoir, il a radicalement changé d’attitude en tournant le dos à ces mêmes associations souhaitant un financement pérenne de l’Etat. 

L’inca ou l’Institut nationale du cancer a été créée en 2005. Elle a pour mission essentielle de piloter les programmes de soins et d’orienter les financements dédiés aux cancers. Critiquée à son démarrage, elle a du faire de gros efforts de neutralité en imposant notamment un comité de déontologie et d’éthique. Aujourd’hui les choses ne sont pas limpides et l’on peut encore s’interroger des relations qui lient les industriels du médicaments, l’Etat, et les responsables de l’Inca.

L’inserm est l’institut nationale de la santé et de la recherche médicale. Son président sortant a été très médiatisé ces derniers mois car il est le mari de la ministre de la santé Mme Buzyn. Le canard enchaîné a dénoncé un conflit d’intérêt flagrant entre les deux personnages et leurs institutions. Forcé de quitter les instances de l’Inserm, il restera cependant dans les sphères de l’Etat en étant nommé conseiller extraordinaire du gouvernement. Depuis le 12 octobre, la biologiste Claire Giry est nommée directrice par intérim le temps que s’opère de nouvelle élection. 

Cela ne fait plus de doute depuis très longtemps, l’industrie du médicament à son ticket V.I.P dans les coulisses du pouvoir. Il est partie prenante dans un grand nombre de débats et d’ orientations prises par un gouvernement. Son empreinte est aussi marquée dans certaines formations professionnelles tendant à vouloir orienter les esprits à son avantage.

Les associations sont nombreuses à lutter contre le cancer mais aussi contre les cancers pédiatriques. La première association indépendante est la Ligue contre le cancer avec ses 106 millions de ressources en 2014. Avec les années, les associations sont devenues un pilier dans le financement de la recherche en cancer pédiatrique. 

Car il faut bien comprendre qu’a l’heure actuelle c’est un peu sa paroisse que chacun finance. Gustave Roussy par exemple finance ce qu’il sait faire et cela peut être un problème majeure si l’on entend une recherche pédiatriques globale du fondamental au clinique, des chercheurs aux cliniciens, et des échanges pouvant exister entre tous les protagonistes sur un territoire donné. 

Le gouvernement pense tout le contraire pour des raisons encore obscures. Deux amendements en un an et la même réponse, “les cancers pédiatriques sont justement financés et apporter des subventions supplémentaires créeraient la confusion”.

Imaginez-vous à la place d’un parent avec son enfant menacé de mort par la maladie à qui l’ont dit qu’il y a assez d’argent pour aider son enfant, pour l’accompagner dignement dans les hôpitaux, pour lui offrir une chance d’un essai à l’étranger, pour assurer convenablement la présence des parents à ses côtés quant on sait que tout est border line à ce sujet.  

Allons plus loin et demandez-vous s’il serait raisonnable que les routes, les préfectures, les panneaux signalétiques soient financer par des associations dans notre pays. Je continue mon raisonnement pour bien me faire comprendre avec le cancer du DIPG qui a emporté notre fille Léonie par exemple.Il y a 50 morts chaque année, (c’est le nombre de décès DIPG en France/an) à un carrefour de la D38 dans un petit village de France, de nombreuses familles endeuillées et l’Etat vous répond: “Nous cherchons les meilleures solutions pour signaler le danger en la matière. C’est une priorité”. Et durant ce temps les associations de la route collectent de l’argent pour acheter un feu rouge, goudronner la route, sensibiliser les conducteurs ou aider les familles financièrement. Cela vous fait sourire…Et bien c’est ce qui se passe en matière de cancers pédiatriques. On vends des gâteaux aux sorties des écoles en attendant que le gouvernement trouve la meilleure solution aux problèmes. 

Cependant pour être complet, il est bon de souligner que l’Etat finance aussi la recherche pédiatrique à hauteur de 3,5% des fonds dédiés à la recherche. Je prendrais le temps de faire un post à ce sujet pour vous donner les valeurs en euros de ce que cela représente par exemple pour aider  et payer nos chercheurs sur le D.I.P.G… Ça va aussi je crois vous faire sourire…

Nul besoin d’être enarque pour comprendre qu’avec cette histoire les responsables politiques traînent les pieds et qu’aucun n’a vraiment envie d’accélérer. Compte tenu de la cause éminemment sensible, on ne sait pas si l’on veut passer sous silence une manière de rajouter une dette à la dette (Un fléchage a pour rôle de déplacer de l’argent déjà collecté et en aucun cas de créer une nouvelle taxe), de faire plaisir aux laboratoires, ou de laisser faire un monde associatif en la matière.

Malheureusement pendant que je tape ce post, 2 enfants viennent de mourir d’un cancer et des centaines d’autres vont subir des traitements encore inadaptés causant douleurs et handicaps. Alors quand Mme De Montchalin parle de trimestres, pour ne pas dire d’années, utiles à la réflexion, je crois que les associations ont de grandes questions à se poser autour d’une table sur le combat qu’elles mènent et sur les stratégies à adopter en matière de lutte contre les cancers des enfants. Il semble que nous soyons devenus un outil pour nos gouvernants car nous sommes nombreux à avoir connu le combat de la maladie et nous avons tous à cœur de mettre un terme à ce drame.

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Au pays de Léonie

Des parents en lutte contre les cancers pédiatriques.